Règlement contre la déforestation
et la dégradation des forêts (RDUE)
Le Règlement contre la déforestation et la dégradation des forêts (RDUE) est le nouveau règlement européen qui vise à interdire la mise sur le marché ou l’exportation depuis le marché de l’UE des produits ayant contribué à la déforestation ou à la dégradation des forêts après le 31 décembre 2020. Ce texte est entré en vigueur le 29 juin 2023 et s’appliquera à l’ensemble des États membres le 30 décembre 2024.
Le champ d’application du texte couvre sept produits : café, cacao, caoutchouc, huile de palme, soja, bœuf et bois, ainsi que certains produits dérivés comme le cuir, le charbon de bois, le papier imprimé.
Qu'est-ce que le RDUE et pourquoi a-t-il été mis en place ?
Principales obligations des entreprises
Stopper la déforestation et la dégradation des forêts, qui participent aux changements climatiques et à la perte de biodiversité, est un enjeu crucial pour le devenir de l’humanité. Le GIEC a d’ailleurs constaté que l'arrêt de la déforestation et la restauration des écosystèmes constituent l'un des moyens les plus efficaces pour réduire les niveaux de CO2.
Selon la FAO, l'expansion agricole est responsable de 90% de la déforestation mondiale, l'Union européenne étant le 2ème plus gros importateur de cette déforestation, derrière la Chine.
La déforestation désigne la conversion des « forêts », telles que définies par la FAO, vers un usage agricole et la dégradation des forêts, définie sur la base de différents critères de changements structurels du couvert forestier.
Le RDUE est une avancée majeure entreprise par l’Union européenne pour répondre à ces enjeux cruciaux, et participer au ralentissement de la déforestation (ce sont 10 millions d’hectares de forêts qui ont disparus chaque année sur la période 2015-2020 d’après la FAO, soit l’équivalent de 10 terrains de football chaque minute). La traçabilité et la transparence sont au cœur du dispositif proposé afin de faire de la durabilité des chaînes d’approvisionnement une nouvelle norme.
Le règlement demande aux entreprises concernées (opérateurs et commerçants tels que définis à l’article 2 du règlement) de garantir que les produits qu’elles exportent, mettent sur le marché ou mettent à disposition sur le marché comportent un risque nul ou négligeable de déforestation. Elles devront notamment géolocaliser l’origine des produits jusqu’aux parcelles de production.
Le RDUE s’appliquera à toutes les grandes entreprises le 30 décembre 2024, le 30 juin 2025 pour les PME.
Les opérateurs et commerçants devront remplir une déclaration de diligence raisonnée dans un système d’information de la Commission européenne qui centralisera l’ensemble de ces déclarations.
Les éléments à renseigner dans cette déclaration sont listées à l’annexe 2 du RDUE.
Articles 4, 5, 8 et 12
Les entreprises concernées devront - directement si l’entreprise est la première à mettre sur le marché les produits concernés - ou auprès de ses fournisseurs :
1) Démontrer la traçabilité et que les produits mis sur le marché sont exempts de déforestation
2) Adapter le cas échéant leurs pratiques d’approvisionnement et diversifier leurs sources d’approvisionnement
Les opérateurs et commerçants exercent une "diligence raisonnée" avant d’importer, d’exporter ou de vendre sur le marché domestique les produits listés à l’annexe 1 du RDUE. Ils mettent en place et tiennent à jour, dans le système d’information européen dédié, un système de diligence raisonnée correspondant à un cadre de procédures et de mesures garantissant que les produits qu’ils mettent sur le marché ou exportent sont conformes à l’article 3, avant chaque mise sur le marché.
Ils transmettent à leurs clients les informations relatives à la diligence raisonnée ainsi que le numéro de déclaration de diligence raisonnée correspondant aux produits vendus. L’ensemble des informations doit être conservé pendant 5 ans par les acteurs économiques.
Les produits de base en cause et les produits en cause ne sont mis sur le marché ou mis à disposition sur le marché ou exportés, que si toutes les conditions suivantes sont remplies :
a) ils sont zéro déforestation;
b) ils ont été produits conformément à la législation pertinente du pays de production; et
c) ils font l’objet d’une déclaration de diligence raisonnée.
Toutes les obligations sont à retrouver dans l'article 4 du règlement.
En quoi consiste la diligence raisonnée ?
Articles 8, 9, 10 et 11
Avant de mettre des produits en cause sur le marché ou avant de les exporter, les opérateurs exercent la diligence raisonnée à l’égard de l’ensemble des produits en cause que fournit chaque fournisseur à titre individuel.
La diligence raisonnée comprend:
a) la collecte des informations, données et documents nécessaires pour satisfaire aux exigences énoncées à l’article 9;
b) les mesures d’évaluation du risque visées à l’article 10;
c) les mesures d’atténuation du risque visées à l’article 11.
Les opérateurs pourront réaliser une diligence raisonnée simplifiée (pas d’étape d’évaluation du risque ni d’atténuation du risque) si les produits en cause viennent de pays ou parties de pays classés à risque faible par la Commission européenne.
Dans ce cas, les opérateurs devront mettre à la disposition de l’autorité compétente, sur demande, les documents pertinents attestant qu’il existe un risque négligeable de contournement du présent règlement ou de mélange avec des produits d’origine inconnue ou originaires de pays ou parties de pays présentant un risque élevé ou standard.
Les entreprises entrent donc dans une phase cruciale de mise en œuvre. Elles doivent dans un premier temps établir leur propre référentiel des produits de sa chaîne d’approvisionnement entrant dans le champs d’application jusqu'à ce que le règlement de l'UE sur la déforestation classe les risques par pays.
En quoi consiste la déclaration de diligence raisonnée ?
Articles 3, 4, 33 et Annexe 2
Avant chaque mise sur le marché, les opérateurs et commerçants devront remplir une déclaration de diligence raisonnée dans un système d’information de la Commission européenne qui centralisera l’ensemble de ces déclarations.
Les éléments à renseigner dans cette déclaration sont listés à l’annexe 2 du RDUE.
Qu’est-ce qu’un système de diligence raisonnée ?
Article 12
Les entreprises soumises au RDUE devront établir un système de diligence raisonnée qui correspond au cadre de procédures et de mesures assurant la légalité et l’absence de déforestation des produits mis sur le marché ou exportés.
Les opérateurs devront réexaminer leur système de diligence raisonnée au moins une fois par an.
Les opérateurs qui ne relèvent pas des catégories de TPE/PME devront publier chaque année un rapport au sujet de leur système de diligence raisonnée en présentant les démarches entreprises en vue d’honorer leurs obligations de diligence raisonnée.
Quel est le calendrier d’entrée en application et de réexamen du règlement ?
Articles 34 et 38
Au plus tard le 30 juin 2024, la Commission européenne doit présenter une analyse d’impact relative à l’élargissement du règlement à d’autres surfaces boisées. Puis, au plus tard le 30 juin 2025, une nouvelle analyse d’impact doit être publiée par la Commission, portant sur l’extension du règlement à d’autres écosystèmes naturels, d’autres produits de base et aux acteurs financiers. Ces études d’impact seront, s’il y a lieu, assorties d’une proposition législative à l’initiative de la Commission européenne.
Le règlement sera réexaminé au plus tard le 30 juin 2028 puis au moins tous les 5 ans par la suite.
Quels contrôles seront effectués ?
Articles 16 à 19
Les contrôles seront effectués par les autorités compétentes de chaque pays. Les contrôles annuels effectués devront couvrir au moins :
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1% des opérateurs dont les produits viennent de pays ou parties de pays à risque faible
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3% des opérateurs dont les produits viennent de pays ou parties de pays à risque standard
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9% des opérateurs dont les produits viennent de pays ou parties de pays à risque élevé ainsi que 9% de la quantité de chacun des produits
Quelle est l’autorité compétente en France ?
Article 14
Une autorité compétente conjointe est désignée en France composée du :
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Ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires
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Ministère de l’Agriculture et de la souveraineté alimentaire
Le schéma d’organisation et les organes dédiés aux contrôles seront précisés dans le courant de l’année 2024.
Quels sont les produits concernés par le RDUE ?
À l’image de la Stratégie Nationale de Lutte contre la Déforestation importée (SNDI), le RDUE s’applique à différentes commodités, qui ne sont pas uniquement des produits forestiers.
La Commission européenne considère que le principal moteur de la déforestation et de la dégradation des forêts est l'expansion des terres agricoles, qui est liée à la production de produits de base importés dans l'UE tels que le soja, le bœuf, l'huile de palme, le caoutchouc, le cacao et le café. Elle a également intégré le bois dans la liste de ces commodités, considérant que la gestion des forêts peut être source de dégradation, qui est parfois une première étape avant la déforestation pour des activités agricoles.
Pour chaque commodité, le règlement définit les types de produits entrant dans le champ d'application de la loi, en fonction d'une liste de codes douaniers de l'UE. Cette liste (qui figure en annexe I du règlement) inclut également certains produits dérivés tels que le cuir, le chocolat et les meubles.
Ressources
Règlement et étude d’impact :
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Règlement (UE) 2023/1115 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 relatif à la mise à disposition sur le marché de l’Union et à l’exportation à partir de l’Union de certains produits de base et produits associés à la déforestation et à la dégradation des forêts, et abrogeant le règlement (UE) no 995/2010 (Juin 2023)
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Etude d’impact de la Commission UE accompagnant le RDUE (anglais – novembre 2021)
Questions / Réponses :
-
Règlement de l’UE sur la déforestation : une opportunité pour les petits exploitants par la Commission UE (Novembre 2023)
-
Foire aux questions (anglais - Décembre 2023)
-
Biodiversité : des produits « zéro déforestation » sur le marché de l’Union européenne par la Commission UE (Novembre 2021)
Autres publications
-
Règlement de l’UE sur la déforestation : une opportunité pour les petits exploitants par la Commission UE (Novembre 2023)
-
Biodiversité : des produits « zéro déforestation » sur le marché de l’Union européenne par la Commission UE (Novembre 2021)
Outils
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L’Observatoire de l’UE sur la déforestation et la dégradation des forêts dans le monde (EUFO) vise à suivre l’évolution du couvert forestier mondial. Cet outil a vocation à appuyer la mise en application du RDUE en proposant des cartes permettant de visualiser l’évolution du couvert forestier depuis 2020 et de fournir des informations sur les flux commerciaux des produits concernés par le règlement. Les données et les informations fournies par cet observatoire sont indicatives et ne constituent pas une garantie quant à la conformité ou la non-conformité avec le règlement.
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Au sein de la plateforme numérique de la Commission européenne, Capacity4dev, un groupe collaboratif est dédié à la déforestation et la dégradation des forêts. Il est possible de partager des informations, des bonnes pratiques et interagir avec les autres utilisateurs concernant la mise en œuvre du RDUE.
La suite du FLEGT et du RBUE
Ce nouveau règlement est la suite de mesures déjà mises en place par l’UE :
Le Plan d'action FLEGT (Règlement sur l'application des réglementations forestières, la gouvernance et les échanges commerciaux), adopté en 2003 et destiné à lutter contre l'exploitation forestière illégale, en particulier dans les pays tropicaux.
Le Règlement sur le Bois de l'Union Européenne (RBUE), entré en vigueur en mars 2013, visant à éviter les ventes de bois et de produits forestiers illégaux sur le marché de l'Union Européenne, à travers un système de diligence raisonnée et une démarche de vigilance de la part des opérateurs de bois ou produits dérivés. Il sera abrogé le 30 décembre 2024.
Les prochaines étapes :
Les autorités compétentes de contrôle, qui devaient être désignées dans chacun des Etats membres au 31 décembre 2023, seront les organisations chargées de l'application et de la mise en œuvre du RDUE. En France, comme pour le RBUE, ce seront les Ministères de l’environnement et de l’agriculture qui seront en charge des contrôles pour appliquer le règlement.
Ces autorités compétentes auront accès aux informations pertinentes fournies par les entreprises telles que les coordonnées de géolocalisation des produits concernés. À l'aide d'outils de surveillance par satellite et d'analyses ADN, elles vérifieront la provenance des produits.
La Commission européenne a par ailleurs mis en ligne un Observatoire européen de la déforestation et de la dégradation forestière permettant d'avoir accès à des informations relatives au suivi du couvert forestier et aux flux commerciaux des produits dans le champ de la réglementation.
Qu’est-ce-que le RDUE change pour les entreprises ?
Bien que le RDUE soit une législation européenne, ses implications sont mondiales, car l’UE est très consommatrice de biens associés à la déforestation et à la dégradation des forêts. Les entreprises devront également vérifier que les produits qu’elles importent ou exportent sont bien conformes à la législation du pays de production, notamment en ce qui concerne le respect des droits de l'homme et des droits des peuples autochtones.